mercredi 16 septembre 2015

Hell on Wheels - Saison 1




Showtime, assurant entre autres les diffusions américaines de Dexter, Californication, Homeland, Shameless ou Master of Sex, a longtemps été considéré comme la principale chaîne de télévision concurrente d’HBO. Cependant, avec Mad Men, Breaking Bad et The Walking Dead, AMC s’est imposé progressivement comme l’un des concurrents les plus sérieux d’HBO. Hell on Wheels n’a pas en France la reconnaissance de The Walking Dead et c’est bien dommage au vu de la très bonne qualité de la série, à mes yeux bien supérieure à celle de The Walking Dead que je ne parviens pas à prendre au sérieux. Avec Hell on Wheels, AMC nous livre un divertissement instructif et culturel d’une rare qualité et la série gagne à être davantage reconnue au sein de l’hexagone. Je viens seulement de finir la première saison donc cette critique ne s’attardera que sur cette dernière. Je publierai cependant une seconde critique une fois la série, encore en cours de production, complètement achevée.

La série prend pour point d'ancrage la mort du président Lincoln et la fin de la guerre de Sécession. Nous sommes donc plongé dans le monde impitoyable de l'Ouest sauvage avec l'arrivée du premier chemin de fer qui va marquer un tournent pour cette culture prête à décimer des populations entières pour se développer. Hell on Wheels, c’est l’histoire de la construction de cette voie ferroviaire qui va changer la face du monde. En effet, à bien des égards, l’édification du chemin de fer reliant New-York à San Francisco fut l’un des plus grands événements de l’histoire américaine. Cette grande entreprise est l’une des causes principales de la puissance américaine et elle est l’un des fondements majeurs de l’ « American Way Of Life ». A l’instar de The Imitation Game (entre autres) et malgré ses imperfections, la série a donc le mérite de porter à l’écran un événement historique remarquable et immanquable.

Hell on Wheels décrit donc, sans gros sabots, les conditions de vie des anciens esclaves noirs et la difficulté tenace à être considéré comme des hommes libres mais aussi le massacre des populations indiennes et les différentes relations entre toutes ces communautés. Elle démontre également que l'homme blanc, qu'il vienne d'Irlande, de Norvège, de Grande-Bretagne ou de n'importe quelle autre terre, n'est intéressé que par deux choses, le pouvoir (notamment celui de vie et de mort sur ces semblables) et les billets verts. Triste constat que celui-ci mais cela prouve la bienséance des créateurs quant à la vérité historique. On est bien loin d'un éloge de la nation américaine et c'est tant mieux !

La série nous offre donc une reconstitution historique tout à fait appréciable, entre punition faite de goudron et de plume et confrontation indiens/cowboys. Car oui, Hell on Wheels est une série que l’on peut qualifier de Western. Vous aurez donc votre dose de saloon et de pistolets à 6 cartouches que l’on doit recharger manuellement et rapidement. Les décors et les costumes sont soignés et il règne tout au long de la première saison une sensation d’insécurité permanente. Contrairement à d’autres séries comme Game of Thrones, Hell on Wheels parvient à maintenir une certaine unité géographique. Ainsi, on passera la majeure partie du temps à suivre les péripéties d’un bidonville de travailleurs et de voleurs, de prêtres et de prostituées, village mouvant chargé de la construction de la voie ferrée.

Mais à mes yeux, la vraie réussite de cette première saison tient à la construction de ses personnages et à leurs interactions ingénieuses. Tout d’abord, le héros est parfait, torturé et charismatique, il fait preuve d’une présence inébranlable à l’écran. Réincarnation de Sawyer dans Lost, il interprète sans fausse note le rôle du cowboy silencieux et tourmenté. Pas de quoi d’extasier non plus car le rôle ne comporte pas énormément de variations d’émotions mais il fait le job plus que convenablement. Dans ce bidonville westernien, on trouve également un prêtre légèrement psychopathe accompagné de son discipline qui se trouve être un ancien indien que ce dernier a accueilli, des prostitués, un leader afro-américain qui va tenter de s’émanciper, un Norvégien froid et intransigeant qui tente te maintenir la sécurité, deux jeunes irlandais innocents qui sont venus faire fortune sur le nouveau continent et Mr Durant, PDG de cette grande entreprise. Tout ça sans oublier la magnifique Mrs Bell, veuve de feu Mr Bell, géomètre au service de Mr Durant pour la construction du chemin de fer. La série prend son temps et chaque personnage a un arc scénaristique complexe avec des scènes qui lui sont consacrées et qui le font évoluer. Enfin, le jeu des acteurs est globalement de bonne qualité.

Cette saison 1 aux 10 épisodes de 42 minutes est donc un vrai plaisir à regarder. Plaisir décuplé par une bande originale de qualité qui utilise notamment la chanson Timshel de Mumford & Sons au début de l’épisode 9, un véritable bonheur ! Prenez le temps de regarder cette très bonne série à la reconstitution impeccable et parlez-en autour de vous, car Hell on Wheels gagne à être connue au sein de l’hexagone. 

4/5

dimanche 13 septembre 2015

Arrested Development



Pour faire d’une voix-off omniprésente, omnipotente et impersonnelle, le pilier principal et la colonne vertébrale d’une série, il faut avoir de l’ambition. Surtout quand on sait que le moteur d’une série c’est ces personnages. Toute bonne série possède des personnages séduisants et captivants, que ce soit dans la complexité de leur construction, dans l’évolution de leur caractère, ou dans les deux réunis. Et fonder la réussite de sa série sur la capacité d’une voix-off à maintenir l’exigence et contenir l’attention du spectateur, c’est profondément ambitieux.

Mais vous ne me ferez pas dire ce que je n’ai pas écrit, les personnages d’Arrested Development sont qu’une qualité inouïe, tous travaillés et soignés avec talent. Ils sont des œuvres scénaristique de génie, gratinés et méga-friqués, bourrés d’imperfections, de fourberie et de faux-repenti et néanmoins d’une sincérité touchante. Cependant, plus on avance dans la série, plus on réalise que la voix-off qui sert de narrateur est le poumon du show. D’une voix monotone et d’un ton sec, le narrateur invisible nous décrit les événements en les contextualisant, corrige les erreurs, réinstaure la vérité, nous instruit à sa façon, tout en envoyant au passage un certains nombres de critiques acerbes et sarcastiques sur ce qu’il juge être la réalité ! Cette voix-off, c’est Ron Howard, producteur de la série et même acteur jouant son propre rôle dans certains épisodes.

Arrested Development, c’est littéralement l’arrêt de la croissance ou de la maturité. La série tâchera donc d’illustrer ce propos à travers la bêtise inconsciente, le manque de recul, l’irresponsabilité et la stupidité pure et simple de ces personnages. Pour vous contextualiser un peu la série, disons qu’elle nous raconte l’histoire d’une famille riche, Les Bluth, aux valeurs douteuses, qui essaye difficilement de remonter la pente vers une richesse inconsciente et facile. La série débute donc sur l’incarcération de George Senior (le père) et l’explosion d’un scandale autour de la fortune Bluth, qui plonge la famille, habituée à l’accès illimité d’argent, dans une situation inconfortable, une précarité fortunée ! Il faut savoir que la famille est faite d’egos démesurés, d’égoïsme forcement aigu, d’incapacité à s’entendre et de lien familiaux aussi fragile d’un billet de banque, et c’est bien là tout le cœur du propos. La famille n’en a jamais été une avant cette soudaine précarité, l’argent maintenant des relations courtoises et hypocrites, voire inexistantes (car c’est plus simple). La brusque insécurité de la leur situation financière va donc amener ces membres de la même famille, que peu de chose unit, à se côtoyer plus qu’ils n’en n’avaient l’habitude.

La série a connu un développement loin de tout repos. Réalisée par Mitchell Hurwitz, la série fut d’abord diffusée par la FOX (3 premières saisons), avant d’être annulée et d’être ressuscitée 7 ans plus tard par Netflix (4ème saison et 5ème à venir).  Si elle a connu outre-Atlantique un grand succès critique, en raison de son originalité et de son excentricité. Malgré six Emmy Awards et un Golden Globe et malgré des apparitions récurrentes d'acteurs tels que Ben Stiller ou Charlize Theron, l'audience américaine n'a pas été suffisante pour la FOX qui a décidé de réduire le nombre d'épisodes de la troisième saison (de 22 à 13) avant d'arrêter définitivement la série. On peut d’ailleurs constater que les épisodes de la troisième saison contiennent des allusions transparentes à l'arrêt programmé par la FOX. Pour la quatrième saison Mitchell Hurwitz a réussi le tour de force de réunir l'intégralité du casting original sept ans après l'arrêt de la série ; mais devant l'incapacité de réunir en même temps tout le casting pour l'ensemble de la saison, celle-ci est construite différemment, chaque épisode étant centré sur un personnage et construit selon son point de vue. Ce procédé complexe, très facilement casse-gueule, est une nouvelle preuve de l’ambition de la série.  

Outre la voix-off de Ron Howard, une originalité dans la narration de la série est la fin de chaque épisode, montrant ce qu'il va se passer « dans le prochain épisode… ». L'originalité vient du fait que les passages montrés ne font que référence à l'épisode qui vient de passer, montrant des suites d'intrigues pour amuser, mais la plupart des extraits montrés n’apparaissent pas par la suite.

Faite d’un humour caustique et déjanté et empreinte d’une débilité inventive, la série n’épargne personne et crache sur toute forme de moralité. On ne peut donc que se réjouir de l’annonce d’une cinquième saison par Netflix. Il nous faut plus de divertissements de qualité comme celui-ci, qui sont d’ailleurs plus d’un divertissement. En parlant de divertissement instructif, je vous conseille de regarder l’émission Last Week Tonight d’HBO (disponible sur Youtube), présentée par John Oliver, mon britannique préféré, qui est à mourir de rire.  

4.5/5

Skyfall




Je n’ai jamais été très fan des films d’espionnage. Je trouve le genre trop homogène, trop codifié, et donc pas assez inventif et surprenant. Il est très rare d’être franchement étonné face à un film d’espionnage, puisque l’on nous resserre toujours des recettes légèrement modifiées de ce que l’on a déjà vu cent fois. Ça s’ouvre donc presque constamment par une course poursuite, ça comprend souvent un méchant que veut détruire le monde, et une petite taupe cachée quelque part est toujours la bienvenue. Bref, ça reste du divertissement pour moi, et rarement un divertissement de grande qualité.

Après avoir vu l’excellent Mission Impossible : Rogue Nation cet été, et suivant de prêt la sortie de Spectre, le nouveau Bond en salle le 11 novembre,  j’ai décidé de redonner sa chance au genre. N’ayant vu aucun bon James Bond de l’ère Daniel Craig (seulement le pathétique Quantum of Solace), j’ai pris la décision de me lancer dans le visionnage de Skyfall, considéré par beaucoup comme l’un des meilleurs Bond. Et je n’ai pas été déçu ! Sam Mendes nous délivre un travail de grande qualité, ce qui ne peut que nous encourager à aller voir Spectre, nouvel opus de l’agent 007 avec Sam Mendes encore au commande et Christoph Waltz dans la peau du méchant.

Quelles sont donc les satisfactions de Skyfall ? En premier lieu, j’ai trouvé que le film nous faisait voyager (Istanbul, Macao, Ecosse…) sans pour autant se perdre en chemin comme cela est souvent le cas dans ce genre de film. Dans la même optique, on peut noter que Sam Mendes, dont la filmographie témoigne plus d’une affection marquée pour le drame psychologique (American Beauty et Noces Rebelles), prend son temps. Ainsi, les scènes d’action ne sont pas légion, et elles sont amenées avec soin et application. J’ai également apprécié les choix de réalisation du britannique et notamment ses jeux de lumière et d’ombre, comme le combat à Shanghai sous la forme d’ombres chinoises, ou encore les nombreux plans sur Bond de dos avec une importante source de lumière jaillissant de derrière (feu dans le manoir, néons au bar…). Pour finir, la satisfaction principale du film est la présence de Javier Bardem en méchant psychopathe. Sa première apparition est splendide et incroyablement orchestrée. Son interprétation du méchant est inédite. Quel grand acteur !!!! De plus, son but diabolique n’est pas de détruire la terre, d’asservir le monde ou tout autre objectif démesuré et par conséquent sans intensité dramatique. La simplicité et la sincérité de son dessein en fond un méchant crédible et appréciable.

Cela étant dit, le film comporte malheureusement son lot de défauts ! Tout d’abord, il donne une vision ridicule du hacking, de l'informatique et de la technologie en général. Ensuite, on est forcé de constater que plus grand-chose ne différencie aujourd'hui un Bond d'un autre film d'action US, dont la noirceur du propos est devenu le fonds de commerce (cf les Batman). Enfin, la palette d’émotion de Daniel Craig reste tout de même limitée et, mis à part un masque crispé, ce dernier nous offre pas grand-chose à nous mettre sous la dent. Pour finir, le générique d’ouverture verse dans le psychédélisme revisité du plus mauvais effet.
  
Rendez-vous dans les salles noires le 11 novembre pour la sortie de Spectre ! Ce nouvel opus sera-t-il le dernier de l’ère Craig ? Qui voyez-vous pour le remplacer, faites-moi part de vos idées dans les commentaires. Personnellement, je verrai bien Benedict Cumberbatch ! Oui, vous m’avez bien lu. 

3.5/5