Cet article sera consacré à la
filmographie encore jeune d’un réalisateur Sud-Africain prometteur, Neil
Blomkamp. Seulement âgé de 35 ans (1979), Neil Blomkamp s’est déjà
admirablement fait remarqué dans l’univers de la science-fiction intelligente
avec trois long-métrages à son actif : District 9, Elysium et Chappie. En
2009, j’avais entendu parler de District 9, un film de science-fiction
subversif qui avait lâché une petite bombe dans le paysage cinématographique de
l’époque. En 2013, j’avais suivi de loin
la sortie d’Elysium, un nouveau film de science-fiction, reconnu plus
conventionnel par la critique. Enfin, en 2015, j’ai longtemps été attentif aux
retours plutôt encourageants sur Chappie. Pris d’une soudaine attirance pour la
science-fiction, j’ai décidé de me pencher sur le personnage.
Avant d’étudier chaque film plus
en détail, on peut d’ores et déjà évoquer plusieurs caractéristiques communes à
la filmographie du Sud-Africain. Tout d’abord, Neil Blomkamp possède le don, si
important en SF, de mettre en place un univers crédible, innovant et captivant.
De la ghettoïsation des extraterrestres à l'intelligence artificielle en
passant par la surpopulation et l’accroissement des disparités économiques,
Neil Blomkamp possède le talent d’exciter et de charmer son spectateur. Ensuite, il se sert de ses films pour évoquer
des maux sociétaux ancrés dans notre monde contemporain. District 9, on le
verra plus en détail par la suite, est clairement une critique ouverte de l’apartheid
et de la xénophobie, tandis qu’Elysium pointe du doigt, avec virulence, la
surpopulation et le développement des inégalités. Ses trois films sont également
des missiles visant la privatisation excessive de notre société, l’armée et la
santé étant constamment déléguées par l’Etat à des entreprises privées. Notons
que Neil Blomkamp figure à la réalisation ET au scénario (parfois même à la
production) de ses films, ce qui ne fait qu’accroître son mérite.
Enfin, Sud-Africain d’origine,
Neil Blomkamp nous fait voyager dans ses long-métrages, deux (District 9 et
Chappie) nous présentant la ville de Johannesburg, aussi connue sous le nom de
Joburg #WelcometoJoburg. On est donc plongé dans un monde qui nous est beaucoup
moins familier que l’habituelle Amérique du Nord. De plus, le jeune réalisateur
n’hésite pas à « caster » des acteurs de son pays et d’autres
étrangers pour jouer dans ses films, ce qui apporte un vent de fraicheur. Mais
le vrai vent de fraicheur est apporté par Sharlto Copley qui figure dans l’ensemble
de la filmographie de Neil Blomkamp. Transcendant dans le rôle principal de
District 9, bleffant en méchant diabolique dans Elysium et tout simplement remarquable
dans son interprétation de Chappie. Un vrai coup de chapeau pour cet acteur
sud-africain déboussolant donc j’ignorais encore l’existence il y a quelques
jours. Arrêtons-nous maintenant plus en
détail sur chacune de ses œuvres :
District 9
Tout comme Josh Trank qui
débarquait en 2012 avec un premier film prometteur, Chronicle, Neil Blomkamp,
le Sud-Africain, a défrayé la chronique en 2009 avec son premier long métrage,
District 9. Le film met en scène un vaisseau extraterrestre flottant au-dessus
de la ville de Johannesburg depuis deux décennies et duquel ont été extrait
environ 2 millions d’extraterrestre (ET). Dans un état de santé critique, les
ET ont été parqué dans un ghetto nommé District 9. L’idée de départ est la
suivante : les autorités en place veulent déporter les ET à 200km au Nord
de la ville pour des raisons de sécurité.
Je ne sais pas si ma description
est vraiment engageante, mais je vous assure que l’univers créé par Neil
Blomkamp est vraiment prenant. Mais la crédibilité de son univers n’est pas la
seule satisfaction, loin de là. District 9 est avant tout un film indépendant,
ambitieux, audacieux et subversif. Tourné à la manière d’un documentaire sur le
personnage principal, le film intéresse dès les premiers instants. Mais c’est
surtout Wikus Van Der Merwe, joué par un excellent Sharlto Copley, un
Sud-Africain également, qui rend le film époustouflant. Ce personnage principal
est juste parfait. Tout d’abord, maladroit et ballot, ce dernier se
métamorphose magistralement tout au long du film… Je vous laisse le plaisir de
la métamorphose ;)
Pour replacer le film dans son
contexte, notons qu’il est basé sur un court-métrage nommé Alive in Joburg,
réalisé en 2005 par Neil Blomkamp. Comme pour le court-métrage d’origine, le
cadre de District 9 est inspiré par des événements historiques qui ont
eu lieu en Afrique du Sud pendant la période de l'apartheid. Le titre du film
est d'ailleurs calqué sur le nom d'une zone résidentielle d'un quartier
difficile du Cap, qui fut déclarée zone réservée aux blancs par le gouvernement
en 1966 : le District Six. 60 000 de ses habitants en furent
expulsés de force et relogés à Cape Flats, 25 kilomètres
plus loin. Le film fait aussi référence aux expulsions contemporaines vers les
nouveaux ghettos de banlieue dans l'Afrique du Sud post apartheid et à la
résistance de leurs habitants. Le film est donc une œuvre contestataire qui
développe plusieurs autres thèmes d’envergure. En effet, les thèmes du racisme
et de la xénophobie sont mis en avant sous la forme du spécisme appliqué aux
extraterrestres. Enfin, MNU (l’entreprise au cœur du projet de déportation) est
l’incarnation du caractère nocif de la privatisation du secteur public.
District 9 est définitivement une
entrée en matière impressionnante de la part de Neil Blomkamp qui prouve tous
ses talents de « storyteller » et de metteur en scène, avec de bonnes
scènes d’action. Ce film lancera définitivement sa carrière après trois
court-métrages, à tel point qu’une suite, District 10, est prévue pour 2020.
4/5
Elysium
En 2013, Neil Blomkamp revient
sur le devant de la scène avec l’artillerie lourde cette fois. Oubliez le film
indépendant, place à Sony Pictures, Matt Damon et Jodie Foster. Rien à voir avec
les 35 000 000 de budget (haha) de District 9, Elysium c’est 90 000 000
de dollars pour 210 000 000 encaissés. La réussite économique du film
n’est donc pas contestable. Et c’est bien normal ! Car même si on ressent
beaucoup les rouages d’un blockbuster, Neil Blomkamp possède le doigter adéquat
pour nous faire oublier le cadrage formaté du film.
Elysium, de ses trois œuvres, est
celle dans laquelle nous nous identifions le plus. Neil Blomkamp parvient à
nous plonger dans un monde futuriste (2154) qui nous paraît complétement
crédible. En extrapolant légèrement les maux de notre monde, il crée une dystopie
plausible. Pour faire court et sans spoilers, la population mondiale étant
devenue beaucoup trop importante, les plus riches sont partis vivre dans une
navette spatiale en orbite autour de la terre, une proximité leur permettant
toujours de dominer la terre et de la maintenir dans une misère contrôlée.
On retrouve dans Elysium
l’esthétique post-apocalypse et les créatures hybrides qui avaient tant
impressionné dans District 9, ainsi que le thème de la survie en milieu hyper
hostile. On retrouve, aussi et surtout, Sharlto Copley qui rayonne en campant
un méchant parfaitement bien senti. Violeur, assassion, truand, tout ce que
vous pouvez imaginer, il le sera. Doué d’un don inné pour la métamorphose, et
doté d’un accent… surprenant, Sharlto Copley est mémorable. Il vole presque la
vedette à Matt Damon pourtant au top. En effet, Matt Damon retrouve, pour notre
plus grand plaisir, l’instinct de survie d’un Jason Bourne. On finira par
applaudir les choix de casting qui m’ont particulièrement réjoui. Notamment le
choix de « caster » des acteurs parlant parfaitement le français pour
jouer des rôles dans la langue de Molière #AvengersPrenezEnNote. A ce titre, Jodie
Foster, diplômé d’un baccalauréat au lycée français de Los Angeles, est
parfaite
Neil Blomkamp tourne son premier
vrai blockbuster : une fable d'anticipation sur la lutte des classes, déguisée
en film d'action et confiante en l’intelligence de son public. Le résultat est
ambitieux, généreux, souvent naïf (surtout à la fin) mais du coup touchant.
4/5
Chappie
C’est assurément l’un de mes
films préférés de 2015. Vous ne le trouverez malheureusement pas dans mon topde mi-année car je viens de le voir mais il y serait définitivement apparu. Quand
on voit les premières images de Chappie, on a d’abord peur (ou pas) d’être
devant un nouveau mélange de Robocop et de Dredd. Mais dès la première
apparition de Dev Patel, on comprend que le chemin emprunté par Neil Blomkamp
sera bien différent.
Décidé à faire de la
science-fiction intelligente, Neil Blomkamp ne pouvait pas rester bien longtemps
loin du sujet le plus brûlant du domaine : l’intelligence artificielle. Ce
qu’il nous propose dans Chappie est excitant, il s’attaque au mystère éternellement
renouvelé, celui de déceler quelque chose d’humain dans un corps qui ne l’est
pas, celui d’une présence inhumaine parmi les hommes. On est donc
très loin d’un Robocop. Il ne sera pas question de flic-robot mais d’enfant-robot,
d’apprentissage, de lien affectif, de famille. Mais rassurez-vous, le tout se
fait sur fond de baston, car Neil Blomkamp est indubitablement un geek bourrin.
En définitive, le film ne ressemble à rien. Il est unique. Encore un univers maitrisé
par la patte d’un sud-africain désormais rôdé.
Le casting est une nouvelle fois
l’un des leviers principaux du film. Dev Patel est absolument génial. Il est le
vent de fraicheur de ce film, en l’absence d’un Sharlto Copley cette fois
robotisé. Il prouve tout son talent d’acteur qui lui avait permis d’exploser
avec Slumdog Millionnaire et Skins. Le méchant est quant à lui bien moins bon
que dans Elysium (forcément !!!) mais il fait le minimum demandé, et
bénéficie surtout d’une première apparition (en armure) très réussie. Si le
méchant n’est pas si bon, c’est que l’accent a clairement été placé sur les « gentils ».
Les seconds rôles, qui épaulent Dev Patel et Sharlto Copley, sont complètement
dingues, dans tous les sens du terme. Complétement possédé, le NINJA est un
personnage délirant, comme on n’en voit pas assez dans les blockbusters
stéréotypés.
Pour finir, Neil Blomkamp nous
offre de nombreuses scènes « idéo-poétiques » tout bonnement incroyables.
La scène de « l’âme » entre Chappie et sa « maman » est un
parfait exemple de ce souffle lyrique qui traverse le film. Les effets de
spéciaux sont aboutis et les scènes de préparation/entrainement, comme il y en
a TOUJOURS dans les films d’action, sont décalées à souhait. Enfin, dans ce
film beaucoup plus ancré dans la réalité, j’ai particulièrement apprécié les
décors choisis par Neil Blomkamp comme la planque de NINJA ou celle du combat
de chien.
Passé (presque) inaperçu en France
lors de sa sortie en Mars 2015, Chappie est pourtant un film magistral,
rafraichissant et innovant. Je vous invite vraiment à le regarder. Ainsi que l’ensemble
de la filmographie de Neil Blomkamp, qui est, à n’en plus douter, un nouveau
maître de la science-fiction. La fin laissant présager un Chappie 2, on ne peut
être qu’emballé.
#CraftLifeDontLetLifeCraftYou
#IndestructibleRobotGangstaNumberOne
#CoolLikeDaddy
5/5
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