Xavier Dolan vient tout juste d’avoir 26 ans, le 20 mars dernier. Ce jeune
prodige du cinéma québécois a pourtant déjà réalisé 5 long-métrages, tous
présentés lors de festivals internationalement reconnus (Venise, Cannes…). Il a
d’ailleurs remporté le Prix du Jury lors de la dernière édition du prestigieux
festival de Cannes, manquant de peu la Palme d’Or. Mais Dolan n’est pas juste
un réalisateur de génie, c’est un monstre de travail, une créature hors-norme,
omniprésente et quasi-omnipotente dans la création de ses œuvres. Acteurs,
réalisateur, scénariste, producteur, costumier, monteur, dialoguiste,
traducteur, doubleur, cet individu atypique est l’étoile montante du cinéma
francophone et bientôt international.
Vous l’aurez compris, mon admiration pour Dolan est sans limite. Ces
bourreaux de travail comme Xavier Dolan, Alexandre Astier ou à un échelon
inférieure Quentin Dupieux (pour ne citer qu’eux !!!), sont des
personnages du monde cinématographique et télévisuel que j’admire profondément.
Ils ont leur univers, leurs acteurs fétiches, leur façon de filmer, leur style
musical, leur style visuel. Et chacune de leur œuvre, bien que parfois très
différentes, sont comme les pièces d’un puzzle ou d’une grande fresque. Chaque
nouvelle œuvre est une pièce apportée à la construction de le leur édifice dont
la structure semble assez bien définie. C’est prodigieux. Mille
respects.
Dolan, en plus de tout cela, à la volonté de traiter des sujets de société
embarrassants et compliqués. Laurence Anyways est en cela sa plus grande œuvre.
Long de 2h30, le film aborde la transsexualité d’une manière prodigieuse. Loin
des idées préétablies, des représentations partielles et des observations
binaires, le jeune québécois, alors âgé de 23 ans, nous délivre une œuvre
cinématographique marquante, certes imparfaite, mais criante de vérité, de
maturité et de plénitude. C’est une claque. Un coup de massue.
Moi qui ai déglingué à l’artillerie lourde la kitscherie outrancière de l’écume des jours, je me dois ici de la valoriser.
Car Laurence Anyways est assurément kitsch. Couleurs vives juxtaposées,
musiques poseuses, effets stylistiques à profusion (pluie de vêtement sur l’île
au noir), c’est kitschissime, cela ne fait aucun doute. Mais c’est assumé et
maitrisé. C’est fluide et ça sert le propos. C’est une immersion dans un
(son ?) univers. La réalisation est évidemment typiquement Dolanienne
faite de gros plans, de ralentis, de personnages filmés de derrière, de vernis
singulier et d’enduit chimérique. On aime ou l’on n’aime pas. Moi j’adore.
C’est précis, décidé, audacieux et arrêté.
Les acteurs sont remarquables ! Suzanne Clément rayonne ! Elle
passe de la colère à l’amour, de l’énergie à la dépression, de l’exubérance à
la simplicité, de l’attachement au renoncement. Elle est absolue et impériale.
Son homologue masculin (si je peux me permettre ^^), Melvil Poupaud, met plus
de temps à rayonner mais c’est justement en femme qu’il deviendra plein,
servant ainsi parfaitement le film.
Laurence Anyways est une œuvre imparfaite mais loin
d'être incomplète. Elle est à mon sens irrésistible et
irréfragable.
4/5