Quand je passais mes oraux
d’école de commerce, une question revenait souvent en entretien de
personnalité : « Quel est votre artiste/intellectuel français
préféré ? ». A cette question, je répondais Alexandre Astier, déjà en
2012. Depuis, le natif de Lyon n’a fait que nourrir mon admiration, alimenter
mon adoration et répondre à mes attentes. Son dernier spectacle, L’exoconférence, est une merveille
d’humour et de savoir.
Alexandre Astier est le fils de
deux comédiens, Lionnel Astier et Joëlle Sevilla. J’ai eu l’occasion de manger
au restaurant, l’année passée, en compagnie de sa mère. Pour contextualiser un
peu, le Bureau Des Arts de mon école de commerce, l’EMLYON, organise chaque
année un festival de court-métrages intitulé le CLAC (Certains L’Aiment
Court). Ce dernier réunit de jeunes étudiants de la région lyonnaise venant
présenter leur production. Ce festival, à l’ampleur grandissante, possède
chaque année un jury, dont j’étais en charge de trouver les membres pour
l’année 2014. La famille Astier étant bien implantée dans la région, et
profitant des contacts d’un membre du jury de l’année précédente (Kadoc de Kaamelott), j’en suis venu à rentrer en contact avec Joëlle Sevilla et la faire
participer à notre festival en tant que membre du jury. Active dans la
formation cinématographique et audiovisuelle, elle est la créatrice de l’école
d’acteur Acting Studio. C’est elle qui a appris à Alexandre l’art de la scène,
tandis qu’avec son père, il apprenait par cœur les répliques complètes de
films.
Alexandre Astier est un musicien,
un comédien, un compositeur, un monteur, un acteur, un réalisateur, un
scénariste, un humoriste mais avant tout un intellectuel. Alexandre Astier a
une soif de savoir qui l’épanche à sa façon, qu’il tente de faire partager, et
qui, en homme minutieux et scrupuleux qu’il est, lui demande un travail de
titan. Pour avoir eu l’occasion d’échanger avec sa mère et son ami Brice
Fournier (Kadoc) rencontré au festival international du premier film d’Annonay,
je peux affirmer qu’Alexandre Astier est un bourreau de travail, tendance
ermite ! Brice Fournier m’a d’ailleurs dit quand je lui ai demandé s’il
était possible de l’inviter à notre festival : « Même nous on doit
aller sonner à sa porte pour le faire sortir », sous-entendu « oublie
direct ».
Parlons maintenant de ce qui nous
intéresse vraiment dans cet article, l’exoconférence.
Tout d’abord, comme son nom l’indique, ce spectacle est une conférence. Cette
dernière est certes entrecoupée de sketchs mais son fil directeur reste le show
du conférencier. Pour ce spectacle, Alexandre Astier est donc allé puiser son
inspiration dans le savoir-faire de grands orateurs. Il avoue dans une
interview s’être pas mal inspiré de Steve Jobs, même s’il a délaissé la
simplicité du créateur d’Apple et préféré opter pour un personnage pompeux,
plus humoristique.
Alexandre Astier est adepte de la
vulgarisation du savoir. Dans un langage quotidien, parfois soutenu, ce dernier
nous instruit en nous illustrant ses propos de petits sketchs humoristiques. Certaines
personnes ont tendance à prendre le mot « vulgariser » dans le
mauvais sens du terme, et rapprochent alors le phrasé du lyonnais à de la
vulgarité. Mal leur en prend, car Alexandre Astier utilise un langage parfois
rustique, voire grossier, mais toujours mélodieux, justement pour faire passer
des messages et des connaissances précieuses. L’exoconférence traite de la
potentielle vie extra-terrestre. Alexandre Astier nous parle alors du principe
anthropique, de l’isotropie, du paradoxe de Fermi, de la sonde Pioneer 10, de
la relativité, du paradoxe des jumeaux de Langevin etc… Bref, il vulgarise des
sujets difficilement accessibles et nous invite à lever les yeux vers le ciel. Il
nous invite à nous poser les questions existo-philo-théoriques de notre
existence, de la nature de ce qui nous entoure. Il nous invite à réfléchir
plutôt que de se laisser porter par la vie. Beaucoup de gens préfèrent ne pas
se poser de questions et Alexandre Astier, personnage assez intransigeant,
semble dénigrer ces derniers.
Sur mon blog de voyage, j’évoque,
dans un article sur mon séjour à Helsinki, le fléau que représente le
christianisme dans la marche en avant du progrès et de la connaissance. J’y
mentionne notamment les retards immenses que la religion du Dieu unique nous a
couté en terme de médecine et je suis content de constater qu’Alexandre Astier
partage mon opinion. Dans son spectacle, il dénonce le christianisme comme
obstacle majeur au développement de l’astronomie notamment grâce à la
reconstitution d’un entretien entre Copernic et un homme de Dieu, un sketch
humoristique hilarant. Mais mes satisfactions personnelles ne s’arrêtent pas
là. Il faut savoir que mon écrivain préféré est Victor Hugo et l’un de mes
peintres préférés Caravage. C’est donc avec un grand plaisir que j’ai pu l’écouter
dans son spectacle citer le poème Stella de Victor Hugo et faire un sketch sur
l’incrédulité de Saint Thomas de Caravage.
En un mot, Youtube c’est bien, L’exoconférence c’est mieux
4/5
Stella
Je m'étais endormi la nuit près de la grève.
Un vent frais m'éveilla, je sortis de mon rêve,
J'ouvris les yeux, je vis l'étoile du matin.
Elle resplendissait au fond du ciel lointain
Dans une blancheur molle, infinie et charmante.
Aquilon s'enfuyait emportant la tourmente.
L'astre éclatant changeait la nuée en duvet.
C'était une clarté qui pensait, qui vivait ;
Elle apaisait l'écueil où la vague déferle ;
On croyait voir une âme à travers une perle.
Il faisait nuit encor, l'ombre régnait en vain,
Le ciel s'illuminait d'un sourire divin.
La lueur argentait le haut du mât qui penche ;
Le navire était noir, mais la voile était blanche ;
Des goëlands debout sur un escarpement,
Attentifs, contemplaient l'étoile gravement
Comme un oiseau céleste et fait d'une étincelle ;
L'océan, qui ressemble au peuple, allait vers elle,
Et, rugissant tout bas, la regardait briller,
Et semblait avoir peur de la faire envoler.
Un ineffable amour emplissait l'étendue.
L'herbe verte à mes pieds frissonnait éperdue,
Les oiseaux se parlaient dans les nids ; une fleur
Qui s'éveillait me dit : c'est l'étoile ma soeur.
Et pendant qu'à longs plis l'ombre levait son voile,
J'entendis une voix qui venait de l'étoile
Et qui disait : - Je suis l'astre qui vient d'abord.
Je suis celle qu'on croit dans la tombe et qui sort.
J'ai lui sur le Sina, j'ai lui sur le Taygète ;
Je suis le caillou d'or et de feu que Dieu jette,
Comme avec une fronde, au front noir de la nuit.
Je suis ce qui renaît quand un monde est détruit.
Ô nations ! je suis la poésie ardente.
J'ai brillé sur Moïse et j'ai brillé sur Dante.
Le lion océan est amoureux de moi.
J'arrive. Levez-vous, vertu, courage, foi !
Penseurs, esprits, montez sur la tour, sentinelles !
Paupières, ouvrez-vous, allumez-vous, prunelles,
Terre, émeus le sillon, vie, éveille le bruit,
Debout, vous qui dormez ! - car celui qui me suit,
Car celui qui m'envoie en avant la première,
C'est l'ange Liberté, c'est le géant Lumière !
Un vent frais m'éveilla, je sortis de mon rêve,
J'ouvris les yeux, je vis l'étoile du matin.
Elle resplendissait au fond du ciel lointain
Dans une blancheur molle, infinie et charmante.
Aquilon s'enfuyait emportant la tourmente.
L'astre éclatant changeait la nuée en duvet.
C'était une clarté qui pensait, qui vivait ;
Elle apaisait l'écueil où la vague déferle ;
On croyait voir une âme à travers une perle.
Il faisait nuit encor, l'ombre régnait en vain,
Le ciel s'illuminait d'un sourire divin.
La lueur argentait le haut du mât qui penche ;
Le navire était noir, mais la voile était blanche ;
Des goëlands debout sur un escarpement,
Attentifs, contemplaient l'étoile gravement
Comme un oiseau céleste et fait d'une étincelle ;
L'océan, qui ressemble au peuple, allait vers elle,
Et, rugissant tout bas, la regardait briller,
Et semblait avoir peur de la faire envoler.
Un ineffable amour emplissait l'étendue.
L'herbe verte à mes pieds frissonnait éperdue,
Les oiseaux se parlaient dans les nids ; une fleur
Qui s'éveillait me dit : c'est l'étoile ma soeur.
Et pendant qu'à longs plis l'ombre levait son voile,
J'entendis une voix qui venait de l'étoile
Et qui disait : - Je suis l'astre qui vient d'abord.
Je suis celle qu'on croit dans la tombe et qui sort.
J'ai lui sur le Sina, j'ai lui sur le Taygète ;
Je suis le caillou d'or et de feu que Dieu jette,
Comme avec une fronde, au front noir de la nuit.
Je suis ce qui renaît quand un monde est détruit.
Ô nations ! je suis la poésie ardente.
J'ai brillé sur Moïse et j'ai brillé sur Dante.
Le lion océan est amoureux de moi.
J'arrive. Levez-vous, vertu, courage, foi !
Penseurs, esprits, montez sur la tour, sentinelles !
Paupières, ouvrez-vous, allumez-vous, prunelles,
Terre, émeus le sillon, vie, éveille le bruit,
Debout, vous qui dormez ! - car celui qui me suit,
Car celui qui m'envoie en avant la première,
C'est l'ange Liberté, c'est le géant Lumière !
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