Je vois mon grand frère une fois
tous les deux ans mais à chaque fois il me parle d’une série qui rentre
immédiatement dans mon panthéon télévisuel. Il y a deux ans c’était
l’incroyable Seinfeld dont je possède
désormais l’intégrale en DVD et qui est devenu ma série préférée et à Noël
dernier c’était Eastbound & Down
ou Kenny Powers en français.
Si vous connaissez, et appréciez,
la série Vice Principals sortie en
2016, alors vous devriez adorer Eastbound
& Down. Les deux ont été créées par Jody Hill (Observe & Report) et Danny McBride (Pineapple express, Tropic thunder, This is the end), ce dernier
jouant le rôle principal dans les deux. Eastbound
& Down est également produite par Adam McKay et Will Ferrell, qui joue un
second rôle exquis, et comporte plusieurs caméos ou rôles récurrents de Seth
Rogen, Craig Robinson, Jason Sudeikis, Michael Pena ou Matthew McConaughey.
Tout cela pour dire que l’aspect comique est entre de bonnes mains. Si on ajoute
à tout ce beau monde le fait que la série est une production HBO, ça donne une
petite merveille.
Kenny Powers est un peu à
l'humour ce que Vic Mackey de The Shield est au genre policier: un personnage
borderline sans limites, testant constamment la capacité d'attraction /
répulsion du spectateur. Improbable gloire déchue du base-ball, Kenny Powers
est en effet un gros bâtard ventripotent, misogyne, raciste et imbu de lui-même
(« I'm Kenny Fucking Powers!!»).Si Eastbound & Down se démarque tout de
suite par son connard absolu de personnage principal, la liberté de ton générale
de la série surprend aussi. Diffusé sur HBO, elle ne se prive jamais de se
vautrer dans la vulgarité et la stupidité la plus édifiante, dans une débauche
constante de sexe, drogue et rock'n roll sudiste.
Mais le vrai tour de force des
créateurs de la série sera de dépasser ces limites pour livrer un portrait
humain de son personnage principal, tout en restant fidèle à sa stupidité de
départ. La mise en scène virtuose des deux réalisateurs attitrés, David Gorden
Green et Judy Hil, excelle ainsi à créer une ambiance troublante, trouvant un
ton unique entre rire gras, lyrisme, consternation et malaise existentiel. La
série tutoie à plusieurs reprises la grâce, achevant de rendre humain ce
personnage si détestable.
Si la série se démarque d’une
sitcom basique, c’est qu’elle attache une importance toute particulière à
l’évolution et à la maturité de son personnage principal. La série n’hésite par
exemple pas à tourner toute une saison au Mexique pour que le personnage de
Kenny Powers parte dans une quête existentielle déguisée en voyage
spirito-dépressif (mais toujours hilarant).
La musique est également
parfaitement choisie, le générique « I'm going down », toujours calqué sur un
arrêt sur image drolatique, ne fait d'ailleurs que mettre en emphase cette
chute annoncée qui n'en finit pas, les paroles sombres de Freddie King sur fond
de guitare endiablée illustrant à merveille le destin à trajectoire unique du
personnage. La B.O en général est d'ailleurs particulièrement soignée,
approfondissant le côté Amérique profonde de la série par un Rock bien sale et
rugueux. Presque constamment utilisée en décalage par rapport au personnage
principal, la musique apporte beaucoup, par exemple dans ce grand moment de
solitude lyrique qu'est la traversée en jet-ski d'un lac par Kenny, sur une
reprise grégorienne de The Sound of Silence de Simon & Garfunkel.
Si Eastbound & Down restera
dans les annales (hin hin), ce sera grâce au personnage culte de Kenny Powers,
qui porte sur ses épaules cette série hilarante, grasse mais irrémédiablement
humaine, qui négocie avec virtuosité ses ruptures de ton.
5/5
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