Westworld, si vous n’en avez pas encore entendu parler, vous êtes à
la bourre. C’est probablement, disons potentiellement, le nouveau Game of Thrones. C’est en tout cas l’intention
notoire de la chaîne HBO qui sait que sa série phare arrive bientôt à son terme
(2 saison raccourcies, 13 épisodes en tout). Si la chaîne diffuse chaque année
plusieurs séries d’une qualité remarquable (Showme a Hero en 2015, The Night Of
en 2016 pour ne citer que des productions originales), il lui faut tout de même
un remplaçant à la colossale et prodigieuse série médiévale-fantastique. Pour
ça, quoi de mieux qu’une série de science-fiction, au Far West, mélangeant
divertissement et questionnement existentielle, produite par J.J.Abrams (Lost, Alias) et avec Jonathan Nolan, frère
et scénariste de Christopher Nolan (Inception, Interstellar), en showrunner
(création, réalisation, scénario). Et c’est sans mentionner l’immense Anthony
Hopkins dans l’un des rôles principaux, information qui aura attiré l’attention
de plusieurs amateurs.
Autant vous dire que sur le
papier, ça a de la gueule. Et en vrai, bah ça a de la gueule aussi. La série n’est
pas une idée originale puisqu’elle est
en réalité un reboot d’un film de science-fiction datant de 1973. L’idée est
cependant géniale et dans un monde où l’on recycle tout ce qui a déjà été fait,
il est surprenant, et à la fois rassurant, qu’on est attendu 43 ans pour
réadapter cette idée dans un format infiniment plus adéquat. Mais qu’elle est
donc cette idée ? Dans un futur assez lointain, un parc d’attraction recréant
l’Ouest américain et peuplé d’androïdes, a été ouvert pour que les plus riches
puissent y venir se défouler sans conséquence. Par androïdes, entendez robot-humains
travaillés dans les moindres détails, pratiquement indiscernables de leurs
homologues de chair et d’os. La journée au parc coûte, il me semble, autour des
40K, donc indiscutablement pour une élite, et on y vient pour vivre une expérience
plus vraie que nature, sans faux-semblant, sans vernis ni masque, pour y
trouver sa vraie personnalité, son moi profond et bestial, son essence pure,
mais aussi, et principalement, pour buter du cowboy et baiser de la pute. Les androïdes,
autrement appelés « hôtes », sont dotés d’une intelligence
artificielle haut de gamme aux multiples variables ajustables, mais aussi d’une
petite part d’improvisation, tout de même contenue dans des boucles narratives.
Pour ne pas trop en révéler, je peux
juste vous dire que des bugs surviennent dans le comportement des hôtes.
Terminée depuis environ un mois,
la série fait déjà extrêmement parler d’elle. Tout d’abord, les dialogues, tout
comme les acteurs qui les délivrent, sont d’une justesse incroyable. Je vous
conseille la vidéo essai du Youtubeur américain The Nerdwriter, dans laquelle
il analyse un dialogue de la sérié, démontrant la précision dans l’écriture et toutes
les nuances dans l’interprétation éclairée d’Anthony Hopkins. Outre les acteurs
et l’écriture, il faut saluer la qualité
dans la production cinématographique. La reconstitution de l’Ouest américain
est extrêmement bien travaillée, et l’univers créé pour les parties futuristes
est également pourvu de bonnes idées (lumière bleu/rouge, les grandes baies
vitrées en guise de box de bureau). Enfin, ce qui élève déjà la série au rang
de potentielle « superstar » des années à venir, c’est les questions
qu’elle pose, indirectement, sur l’intelligence artificielle, les frontières qui
constituent la vie humaine, l’existence d’une « méta-conscience »…
Mais voilà, si j’ai beaucoup aimé
cette première saison, je me fais du souci sur la capacité qu’à la série à
rebondir et nous maintenir en haleine pour les 5/6 années à venir. On sait déjà
qu’on aura probablement le droit à d’autres parcs (Samouraï et consorts), mais
j’ai peur que la série recycle les mêmes questions, écules les mêmes
révélations, et qu’elle ne nous mène finalement nulle part. La série est complexe,
retorse, et follement ambitieuse, comme Lost
(surprise !!!!), Westworld
donne indéniablement envie de discuter, d’en découdre. Mais Lost nous a
aussi fait pleurer (Charlie RIP). Pas sûr que Westworld s’abaisse à ce genre de
premier degré, mais on verra. Je ne
serais pas aussi catégorique, mais le New Zealand Herald a titré un
article : «Comment HBO vient de tuer l’âge d’or des séries», expliquant qu’avec
cet objet «pompeux» et «sur-signifiant»,
la chaîne à péage américaine mettait elle-même un terme à ce qu’elle avait
contribué à lancer magnifiquement au tournant du millénaire avec les Soprano et The Wire, des séries vivantes et organiques, qui contrastent avec la relative
froideur de Westworld. [SPOILERS] Enfin, pour illustrer ma peur concernant le renouvellement
créatif de la série, je pointerais du doigt l’arc narratif finalement assez
pauvre de « l’homme en noir », dont les péripéties ont été relativement
inutiles, ainsi qu’un certain sentiment d’avoir assisté à un long prologue de
10 épisodes.
En
somme, je ne pense qu’elle sera la « série-monde » qu’elle semble
destinée à être. Personnellement elle reste assez loin de mon top 5, même dans
sa catégorie (drame). Mais elle mérite quand même amplement votre attention. Si
c’est un jour le nouveau Game of Thrones vous serez fier de dire que vous faisiez partie des premiers.
4/5
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